Dans cette seconde partie, nous verrons l’intégration de Saint-Malo et ses forts dans le Mur de l’Atlantique. La Festung Saint-Malo comportant environ 550 blockhaus composant quelques 135 points d’appui, nous ne pouvons, bien évidement, pas les traiter en totalité. Après quelques repères sur la ceinture fortifiée de la Festung, cette partie d’article se concentre sur les principaux points d’appui que sont : le cap Fréhel, la Pointe de la Varde, la Garde Guérin, le Grand Bé, l’île de Cézembre et le port de Saint-Malo.
Le Mur de l’Atlantique à Saint-Malo
Le 23 mars 1942, Hitler publie sa directive de guerre no 40 ordonnant toute une série de mesures visant à renforcer les côtes des pays occupés ou annexés. L’Oberkommando der Wehrmacht (O.K.W.), [organe de commandement suprême des forces armées allemandes de 1938 à 1945], décide la construction de fortifications sur toute la côte occidentale de l’Europe continentale.
Une des priorités se porte sur la mise en état de défense des îles Anglo-Normandes et de Saint-Malo. En effet, Hitler estime qu’un débarquement massif, pour avoir des chances de succès, nécessite de disposer d’au moins un port d’importance. Or, dans la totalité de la Manche occidentale, Saint-Malo est le seul port permettant le ravitaillement de troupes débarquées entre Cherbourg et Brest, deux ports à l’hinterland [arrière-pays, région qui s’étend à l’intérieur des terres ou au-delà d’un territoire occupé] resserré. Également, les infrastructures de ce port sont primordiales pour la Kriegsmarine pour effectuer des transferts de troupes et de matériels sur les îles Anglo-Normandes. De Saint-Malo en croisant les feux avec Guernesey et Jersey, il est possible de contrôler l’accès à la Manche occidentale.
Dès septembre 1942, le terrain d’aviation de Dinard-Pleurtuit, est pourvu d’ouvrages de défense protégeant les deux pistes de la Luftwaffe contre des attaques en rase-motte ou en piqué. Cette même année, les Allemands installent au Cap Fréhel une importante station radar, tant d’acquisition que de poursuite.
Petit focus sur la station lourde du Cap Fréhel et de la Pointe du Jas.
Cette station radar codée Stüzpunkt La 318 est occupée conjointement par la Luftwaffe et la Kriegsmarine. La station occupée par la Luftwaffe est dénommée ″Frosch″ [grenouille]. Une série de cinq radars d’avertissement et d’approche de longue portée est installée sur ce site stratégique : un radar Mammut Fumo Caesar 52 (servi par la Luftwaffe) sur un bunker à un étage et d’une portée de 300 kilomètres, un radar Freya Fuse 42 (servi par la Kriegsmarine) sur un bunker à deux étages et d’une portée de 130 kilomètres, un radar d’alerte précoce Freya Fuse 80 LZ (servi par la Luftwaffe) sur socle et d’une portée de 200 kilomètres, un radar Würzburg Riese FuSE 65 L (servi par la Kriegsmarine) fixé sur un socle hexagonal et d’une portée de 60 kilomètres, un radar Würzburg Riese FuSE 68 M (servi par la Luftwaffe) sur socle et d’une portée de 75 kilomètres et d’un radar directeur de tir des batteries anti-aériennes du site Würzburg Riese 39 sur socle béton boulonné.

Carte du positionnement des stations radar du Cap Fréhel et sur la Pointe de Jas. A partir d’une carte de l’inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France.
Légende de la carte :
- un radar Mammut Fumo Caesar 52 fixé sur un bunker à un étage (Regelbau L 485 de type large) et défendu par un canon de 50 millimètres KwK 38 ;
- un radar Freya FMG 42 fixé sur un bunker à deux étages et le blockhaus de commandement et pour le contrôle des vols de nuit (Anton L479, unique en Bretagne) ;
- un radar Würzburg Riese FuSE 65 L fixé sur un socle hexagonal et un appareil Freya Fu.MG L401 LZ protégés par trois canons antiaériens jumelés de 20 millimètres Flak 38 Vierling ;
- un radar Würzburg Riese 39 (t) fixé socle béton boulonné et protégé par deux canons antiaériens quadruples « Drilling » de 20 millimètres sur affûts bétonnés en patte d’oie ;
- un radar Würzburg Riese FuSE 68 M fixé sur un socle et protégé par un canon anti-aérien de 20 millimètres, affût simple semi-enterré ;
- un radar Freya Fuse 80 LZ fixé sur un socle ;
- un point d’eau aménagé et une citerne bétonnée ;
- des baraques semi-enterrées dans une cuve quadrangulaire bétonnée reliées à deux abris (magasin et infirmerie) ;
- deux bunkers R622 (un seul encore visible) permettant d’abriter deux groupes de combat (20 hommes) et entourés de Tobrouk et d’encuvements pour canons de 20 millimètres ;
- le poste d’observation du phare du Cap dynamité par les Allemands le 11 août 1944 (la construction du phare actuel débute en 1946) ;
- baraques de la cuisine et du réfectoire, baraquement des officiers et un magasin ; avec à gauche un point d’eau aménagé et une citerne bétonnée ;
- un canon de 150 millimètres en encuvement, un poste d’observation avec une cloche blindée réutilisant une ancienne cabane à moutons, un petit abri pour le personnel et un Tobrouk ;
- l’embarcadère pour la liaison avec Saint-Cast et la Festung de Saint-Malo.
Le site était parcouru par un réseau de tranchées, encore visibles par endroit.
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Un site sur les installations de la Pointe du Jas : ici.
Il ne s’agit que d’un survol de cette importante station radar. Vous trouverez de plus amples données et des renseignements bien plus précis dans le livre ci-dessous, s’il est toujours disponible.

Yanning Kerhousse et l’association GERFAUT ont édité un petit livre sur l’occupation et fortifications du Cap Fréhel.
La place forte (Festung) de Saint-Malo

Plan des positions allemandes de la Festung de Saint-Malo et de Dinard. A remarquer la première ligne de défense à la hauteur de Châteauneuf, le réduit de Cancale qui sera abandonné et la ligne de défense devant Pleurtuit. Source Heimdal d’après un plan allemand conservé au Bundesarchiv, collection Truttman.
Saint-Malo est une ville close entourée par la mer, protégée par des remparts médiévaux modernisés au XVIIe siècle. Un temps relié à la terre que par un isthme étroit en direction de Paramé à l’est. De même, la ville a bénéficié de nombreux ouvrages de défense, compte tenu de sa position sur l’embouchure de la Rance. Elle est aussi entourée de nombreux forts (Les forts de Saint-Malo). L’ouvrage principal est implanté à Saint-Servan sous le nom de fort de la Cité ou fort d’Aleth. À l’ouest, la Rance équivaut à un glacis protégeant les approches et à l’est, l’on trouve la Pointe de la Varde avec son fort du XVIIIe siècle.

« Plan de St Malo. En l’état qu’il est aux plus basses marées des équinoxes ». Sur cette carte on voit bien que Saint-Malo n’est relié à la terre que par le Sillon.
Le fort de Saint-Père-Marc-en-Poulet
L’éventualité d’une attaque terrestre conduit à la construction à partir de mars 1777, par l’ingénieur de Caux d’un fort contrôlant l‘isthme étroit entre Rance et baie du Mont-Saint-Michel : le fort de Châteauneuf ou fort de Saint-Père.

Le fort de Saint-Père, fort Saint-Père ou fort de Châteauneuf (codé Ra153) est un fort situé sur la commune de Saint-Père à 9 kilomètres au sud de Saint-Malo. Construit au XVIIIe siècle sous le règne de Louis XVI pour protéger la cité corsaire des attaques anglaises venues des terres. Les troupes allemandes s’en servent comme dépôt pour des obus de 194 millimètres, de 75 millimètres et pour des torpilles de la Kriegsmarine. Lors de l’abandon du fort face à l’avancée des troupes américaines vers Saint-Malo, le fort est en partie pétardé. Brièvement occupé par l’armée américaine, il sera déblayé entre 1944 et 1950 puis utilisé par l’armée française comme dépôt d’explosifs. Une partie du déminage des plages y est alors stockée. L’armée l’abandonne à la fin des années 1970 et le déclasse en 1985, il est alors reversé au Domaines. Le fort est racheté par la commune de Saint-Père en 1989. Elle y entame alors de longs travaux de restauration qui seront accélérés avec l’installation de la Route du Rock. A ses pieds, à gauche, la route conduisant à Saint-Malo et à droite, celle conduisant à Cancale. Source Géoportail.
C’est à partir de ces ouvrages existants qu’est organisée la Festung. Ces implantations ne doivent rien au respect du passé, les emplacements choisis s’imposant. Si la portée des canons a considérablement évoluée en trois siècles, la topographie par contre est immuable. Cependant la Rance n’est plus un glacis, il faut donc créer un ensemble fortifié sur la rive gauche et recréer des ouvrages sur Cézembre pour qu’elle devienne la clef de voûte de la défense maritime de Saint-Malo.
La grande période de construction est l’année 1943. Cependant, des réalisations sont lancées dès la fin de 1942. Il semble que certains ensembles fortifiés sont entrepris alors que les spécifications techniques des ouvrages défensifs ne sont pas définitivement arrêtées. La Festung Saint-Malo paraît avoir servi de laboratoire expérimental.
On estime que 240 ouvrages (sans compter ceux de l’île de Cézembre et les multiples Tobrouk) ont été coulés et qu’aucun ne comporte de front Todt, ces embrasures à sous-face à redans que l’on trouve pourtant sur tous les ouvrages des côtes hormis l’ensemble malouin. À Saint-Malo, le seul groupe d’ouvrages comportant des fronts Todt est l’ensemble du Grand Bé, le dernier réalisé. D’où la supposition d’expérimentation à Saint-Malo avant leur généralisation.

Les quatre casemates M272 de la batterie de Longues-sur-mer sont pourvues d’un front Todt. Chacune abrite une pièce de marine de 150 mm TK C/367 sur affût à pivot central (affût pour destroyer, sorte de tourelle ouverte sur l’arrière). Ces canons de marine avaient une portée qui avoisinait les 20 000 mètres. Photographie Fortification et Mémoire.
La défense terrestre et maritime
Pour fermer la Festung Saint-Malo, après les ouvrages face à la mer, des fortifications contre une attaque par voie terrestre sont construites. Cette zone fortifiée s’étend sur 250 km2.

Carte de la dernière ligne de défense de Saint-Malo montrant les divers points d’appui : La Varde au nord-est, appuyé par Saint-Ideuc dans Paramé ; la Montagne Saint-Joseph au centre ; La Madeleine au sud ; le château et la ville intra-muros ; le Grand Bé ; la Cité à Saint-Servan. Dessin de M. Truttmann, d’après un croquis du Service Historique de la Marine de 1946.
La défense terrestre
La défense contre une attaque terrestre est naturellement organisée en profondeur, car les concepts « Marine » (pièces d’artillerie en cuve tirant tous azimuts) ne peuvent s’appliquer. La rive droite de la Rance est couverte par une double ligne de défense.
La première ligne de résistance barre l’isthme entre la baie de Cancale et la Rance, cette position est dirigée par le fort de Châteauneuf (codé Ra153, contrôlant le carrefour des routes de Rennes, de Dinan et de Cancale et renfermant le plus important stock de munitions de la Festung) avec un fossé noyé (dit Canal des Allemands, transformé en canal (biez) après la guerre), creusé à travers les marais, par Saint-Guinoux et la Fresnais, entre Saint-Benoît-des-Ondes et Châteauneuf et, des barrages antichars au-delà.

La première ligne de défense à partir de Saint-Benoît-des-Ondes avec la canal des Allemands jusqu’à la Rance en passant par le fort de Châteauneuf. Source Géoportail.
Une deuxième position de résistance, part des abords de la Pointe de la Varde, et contourne Saint-Ideuc, Paramé, le Petit-Paramé, la Madeleine, pour rejoindre la Rance près de la Göeletterie. À l’intérieur de cette zone fortifiée, de nombreux ouvrages barrent l’accès au port, à la ville intra-muros et à Saint-Servan.

Première partie de la deuxième ligne de résistance partant de la Pointe de La Varde, contournant Saint-Ideuc, la Croix Desilles puis suivant l’actuel boulevard périphérique. Source Géoportail.

Seconde partie de la deuxième ligne de résistance de la Madeleine à la Rance en passant par la Göeletterie. Source Géoportail.
La rive droite de la Rance
La rive droite de la Rance, le « Clos Poulet », présente de nombreuses plages, elles sont battues par l’ouvrage de La Varde. À l’extrémité occidentale de la grande plage, le groupe de casemates du Grand Bé croise ses feux avec celles de La Varde.
Il existe une ligne antichar composée de rails curtoirs de la plage du Minihic, passant par les Réservoirs, la fontaine aux Pèlerins, le pont Robert, la Godelle et finissant à la voie ferrée. Cette ligne est complétée d’un réseau de fils barbelés et de nombreux champs de mines, renforcée par des tranchées et des abris de mitrailleuses. Elle est soutenue, au nord sur la côte par le fort de La Varde et avec des batteries et des abris bétonnés, en arrière, notamment par le fort du Tertre aux Loups et par la casemate R677 du phare de Rochebonne (position codée Ra111).

Casemate R677 avec son canon de 8,8 centimètres Pak 38/41 à la pointe de la Rochebonne. Source Bundesarchiv.
La principale défense est constituée par la position de Saint-Ideuc (codées Ra160 et Ra603) avec 4 canons Flak de 7,5 centimètres M35 (h) auquel est associé un double blockhaus aux Réservoirs capable de couvrir tout le terrain entre le Lupin et le village du Gué. Un blockhaus et 8 Tobrouk à la fontaine aux Pèlerins (codée Ra605) qui eux couvrent la Croix Désilles, les Chênes et le Bélévent. Du Bélévent à la Godelle (codée Ra610) avec son blockhaus R669 avec un canon de 7,5 centimètres et à la voie ferrée, la défense est plus faible : quelques champs de mines, des maisons d’habitation fortifiées et de petits abris pour mitrailleuses. C’est par là que passeront les Américains. En arrière de cette ligne de défense, les Allemands ont fortifié quelques points, dont la maison de l’armée du Salut, à Parc Ombrages, aux Chênes. Une batterie et des tunnels sur la Montagne Saint-Joseph protègent l’accès du marais.
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Cet imposant bloc de béton, entremêlé de ferrailles, se cachait au passant depuis des années. Enterré sous un terrain vague surplombant la rue du Grand Jardin, face à la rue du Clos Baron. Il est mis à jour fin 2015 pour être détruit en vue de construire un collectif de 21 logements (2016). Au début des années 1990, l’élargissement de la rue du Grand Jardin oblige à détruire une partie de l’ouvrage, essentiellement la chambre de tir et la soute à munitions. Ce blockhaus (R624), le spécialiste malouin de la Seconde guerre mondiale, Eric Peyle, en connaît bien l’histoire. « Il était destiné à abriter une mitrailleuse lourde MG 34 avec son stock de munitions et ses deux équipes de servants, soit 6 hommes. Il couvrait la voie ferrée et le bas de la Montagne St Joseph ». Et Eric Peyle de raconter son attaque par les Américains, un matin du 7 août 1944. « L’assaut fut repoussé grâce au soutien d’unités d’infanterie allemandes installées aux alentours. La nuit suivante, un éclaireur américain signala l’ouvrage abandonné et une nouvelle attaque fut aussitôt lancée. En fait d’abandon, les Allemands étaient partis se désaltérer et la première vague d’assaut fit les frais de cette erreur d’appréciation… ». Source le Pays Maloiun.
Celle-ci doit comporter également un obstacle anti-chars enserrant complètement la ville, du Troctin (non loin de la Pointe du Coudray, près de l’usine marémotrice de la Rance) jusqu’au Bignon (à l’entrée de la Pointe de la Varde).
En 1944, ces lignes de défense sont loin d’être terminées.
La rive gauche de la Rance
Dans la zone la plus large, du Pleurtuit à la Rance, sept ouvrages identiques ont été coulés à La Richardais (codée Ra156). Elle est équipée de 6 canons de 12,2 centimètres K.390/2 (russe) installés sous 4 casemates R611 et 2 casemates R669. Aujourd’hui, toutes les casemates sont en zone urbaine, soit dans les jardins, soit comme sous-sol ou garages dans des propriétés privées.

Une photo aérienne de 1952 de la batterie avec les quatre casemates R611, les tranchées et les casemates R669. Les cinq bunkers complémentaires sont entourés en rouge. Source atlantikwall.co
Saint-Malo dispose du classique arsenal de défense des plages.
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Soldats allemands installant des tétraèdres en béton sur la Grande plage de Saint-Malo. En arrière-plan et sur la droite, la chaussée du Sillon. Au fond et sur gauche s’amorce la pointe de La Varde.

La plage du Sillon avec ses défenses de plages (tétraèdres, portes belges) avec au fond le Grand Bé et le Petit Bé.
La défense maritime
Le Grand Bé (Ra276)
Les Allemands prennent possession de l’îlot et décident d’y implanter une batterie d’artillerie côtière (Ra276) afin de protéger la baie de Saint-Malo, devenant ainsi l’un des éléments de la Festung Saint-Malo. C’est un important point d’appui : il comprend 4 casemates R671s pour 4 canons de 105 millimètres S.K.L.18/40, un poste de direction de tir Leitstand M162a/SK, des bunkers pour la défense rapprochée : une casemate SK pour canon de 5 centimètres et un canon de 7,62 centimètres F.K.295/2 sur plateforme, des cuves pour canons antiaériens, des abris pour le personnel (R622 et R621), 4 soutes à munitions et de nombreuses tranchées. Un projecteur antiaérien de 150 millimètres est installé à proximité immédiate de la tombe de Chateaubriand. Le point d’appui est pris en charge par la deuxième batterie du bataillon d’artillerie de marine 608 (2./M.A.A.608).
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Pendant la libération de Saint-Malo durant le mois d’août 1944, les artilleurs allemands tirent à de nombreuses reprises sur les troupes américaines, amenant celles-ci à bombarder l’îlot afin d’y faire taire les canons allemands. La position est donc pilonnée par l’aviation et par l’artillerie de nombreuses fois. Après la prise du château de Saint-Malo et du bastion de la Hollande le 14 août 1944, l’intra-muros était aux mains des Américains. Il ne restait plus que trois positions fortifiées sous contrôle allemand : le fort de la cité d’Aleth, l’île de Cézembre et le Grand Bé.

Bombardement du Grand Bé en août 1944 par des B-24 Liberator américains. A droite, on distingue le fort de la Cité. Source US Army.
Le 16 août 1944, les Américains décident d’attaquer le Grand Bé et demandent au responsable du port des informations au sujet des marées. Vers 13 heures, malgré une marée montante, l’attaque est menée par la compagnie G du 3e bataillon du 329e régiment d’infanterie, prenant la position par un assaut à la grenade sous le couvert de fumigènes. La résistance allemande est sporadique et la garnison se rend en masse peu après l’attaque. La prise de la batterie allemande coûte quelques blessés aux Américains ; ceux-ci ont néanmoins réduit un des points importants de la défense allemande de Saint-Malo en faisant 154 prisonniers. Le 26 août, des artilleurs américains prennent possession des canons allemands encore intacts sur le Grand Bé et commencent à tirer sur Cézembre qui riposte en tirant violemment sur l’îlot. Cette terrible réplique stoppe les tirs américains du Grand Bé, qui ne recommencent plus.
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Sur cette photo du Grand Bé prise après la fin des hostilités, on distingue très nettement les blockhaus installés par les Allemands en vue de fortifier la côte. Ces constructions ont depuis été détruites, seules en reste leurs bases bétonnées.

Le Petit Bé (à gauche) et le Grand Bé (à droite). A l’entrée du Grand Bé (au-dessus du panneau explicatif des marées) se trouve un abri pour mitrailleuses. A droite, les restes des anciennes fortifications.

En couverture du numéro d’octobre 1940 du magazine de propagande Westfront – Illustrierte, ce soldat allemand, MG en position, surveille les abords de Saint-Malo ? En tout cas, en bas à gauche, on reconnait la tombe de Chateaubriant sur le Grand Bé.
Le Petit Bé (Ra116) n’est équipé que d’un abri pour mitrailleuses.

Servants américains d’un canon anti-char de 57 millimètres prenant la pose, avec au fond le fort du Petit Bé.

Vue aérienne, datée de 1966, du petit Bé et du grand Bé. Sur celui-ci, on remarque encore les traces des positions allemandes. Source Géoportail
La Pointe de la Varde (Ra109)

La Pointe de la Varde à l’entrée de laquelle ont aperçoit le vieux fort. A gauche, la plage du Mihinic et Saint-Malo. A droite, la plage du Val et Rothéneuf. Source Géoportail.
La pointe de la Varde est une pointe rocheuse à l’est de Saint-Malo d’une superficie d’environ 6 hectares, dans le quartier de Rothéneuf. Site naturel protégé culminant à 32 mètres au-dessus de la mer, elle offre un panorama sur la baie de Saint-Malo et un des plus beaux points de vue sur la côte d’Émeraude.

Carte postale de la pointe de la Varde montrant les environs de Saint-Malo dans les secteur de Paramé, Rotheneuf et son importance pour couvrir les abords de Saint-Malo. A droite, on aperçoit le fort de la Varde.
La construction du fort de la pointe de la Varde, appelé aussi batterie du fort de l’Arboulé (son appellation jusqu’en 1748), est réalisée rapidement en 1694 en complément des défenses du port malouin par Vauban.
Il s’agit d’une construction sommaire composée d’un mur d’enceinte défendu d’un fossé. Les vestiges de ces premiers ouvrages défensifs sont recouverts d’une enceinte en maçonnerie qui s’étale en bordure de la falaise ouest, plus importante de part ses dimensions et apte à assurer la défense d’une baie au fort trafic maritime. Vauban édifie sur ce fort une puissante redoute à bastions. Les murailles du fort de l’Arboulé sont consolidées et modernisées pour former quatre bastions à capitale protégés par un fossé et un chemin couvert. La garnison comprend alors 2 officiers, 30 soldats, 15 matelots, et 117 canonniers.
.Carte postale montrant le fort de la Varde avant-guerre.
Au XIXe siècle, il se dote d’un nouveau magasin à poudre d’une contenance de 5 600 kilogrammes. En 1898 et 1899, hors des fortifications, la pointe extrême se dote de puissantes batteries modernes : 14 canons de 95 millimètres sur affûts de campagne. Elles sont installées sur une plateforme rocheuse en bordure du front de mer. Cependant, il s’agit d’une batterie mobile pouvant être amenée à se déplacer au grès des besoins.
En 1900, le fort perd de son importance dans la défense de la Cité Corsaire. Il sert un temps de parc d’artillerie, de caserne et de réserve pour alimenter la nouvelle batterie.
En 1942, dans le cadre de l’organisation de la Festung Saint-Malo, l’armée allemande réaménage les fortifications existantes en y adjoignant des blockhaus pour contrôler les plages de Rothéneuf. Sept bunkers prennent place sur l’emplacement de l’ancien fort, une casemate à cloche blindée R 112, un abri faisant office de poste de commandement R 502, une casemate pour une pièce de 47 millimètres Skoda R 506 : une casemate pour 50 millimètres R 600mod., une casemate R 667 pour une pièce de 50 millimètres, une casemate R 611 pour un canon de 105 millimètres, un abri à personnel modifié pour y recevoir une usine de production électrique R 622 et quatre Tobrouks simples, dont un grand tobrouk pour mitrailleuses antiaériennes ou pour mortier. À l’aplomb de la façade ouest du promontoire, quatre blockhaus observatoire d’artillerie à cloche blindée R 120, une casemate R 611 pour un canon de 105 millimètres, un abri à personnel R 622, une casemate R 633 pour un canon de 75 millimètres et un Tobrouk ont été implantés dans l’alignement des remparts. L’ensemble est relié par un réseau de tranchées et protégé par des barbelés et des champs de mines.
La garnison comprend alors 102 hommes et 4 officiers placés directement (comme toute la Festung Saint-Malo, soit environ 10 000 hommes) sous les ordres du colonel Andreas Von Aulock et de son état-major.
La Pointe de la Varde est le point de départ de la « deuxième » position d’arrêt, celle contournant la Göeletterie.
À la différence des positions de la Garde Guérin et du fort de la Cité, aucunes galeries souterraines ne relient les bunkers. Certaines casemates sont construites dans l’enceinte même du fort, en particulier l’abri de commandement. D’autres sont implantées dans les fossés, aux angles de la contrescarpe. D’autres encore à l’extérieur des glacis. Le périmètre du fort est de 45 mètres environ sur 75 mètres, les blocs sont relativement rapprochés entre eux. Néanmoins, la plupart épousent sensiblement le terrain. Seules, les casemates d’artillerie émergent véritablement de l’ensemble.

La position de la Varde vue du ciel. Les blockhaus y ont été répertoriés. Source atlantikwallbretagne.superforum.fr

La position de la Varde vue « côté Saint-Malo ». Les blockhaus y ont été répertoriés. Source atlantikwallbretagne.superforum.fr
Les différents bunkers
Deux casemates (R611) pour 105 millimètres F.K.243 (h) tirant vers Saint-Malo intra-muros et sa la rade, en interdisant l’accès.

Photographie des années 1990 montrant l’arrière de la casemate R 661 positionnée dans l’enceinte du fort.

Plan type d’un R611.
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Deux casemates pour canon anti-char de 50 millimètres L/42 et L/50 prenant en enfilade l’anse de Rochebonne (types standard R600 et R667).

Plan type d’un R600.

Plan type d’un R667.
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Le R600 vu de dessus. Sur sa droite, la « cheminée » en parpaings est un puits obstrué à une dizaine de mètres. Il est muni de barreaux métalliques pour monter ou descendre. Photographie FortificationetMémoire (2018).

La position vue de face. Au premier plan, la casemate R600 à 2 étages pour un 5cm KwK Pak L/60. En arrière plan, à gauche, au pied du bastion, le second bunker pour Pak 5 cm. A droite, la cloche pour mitrailleuse à 6 créneaux du R667. Au fond, les ruines du vieux fort avec au centre, l’entrée originel du fort. Photographie FortificationetMémoire (2018).

Sur cette carte postale d’après-guerre, on distingue sur la droite les blockhaus des canons de 5cm. Le fort est encore en bon état et l’on distingue en encore l’encadrement de son entrée.
Une casemate R653 pour un canon de de 50 millimètres KwK L/42 battant l’anse de Rothéneuf.

Plan type d’un R653.

La casemate R653 pour un canon de 50 millimètres KwK L/42. Il s’agit d’un très vaste bunker pour une arme de ce calibre. Source atlantikwall.co.uk
Une casemate (R506c) pour un canon anti-char de 47 millimètres Pak 36 Skoda avec une mitrailleuse jumelée en flanquement arrière ves la route d’accès à la Pointe. Il couvre le côté est de la positon.

Le R506 en 1996. On remarque l’accès au bunker bien intégré dans la contrescarpe de l’ancien fort. Source BunkerSite.com

Photographie des années 1990 montrant une vue générale de la casemate R 506 et l’inclinaison du glacis. La végétation n’a encore tout à fait repris ses droits.
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La casemate (R506c) pour un canon anti-char de 47 millimètres Pak 36 Skoda. Un coup d’embrasure semble avoir détaché la partie droite de la façade. Au fond, l’extrémité de la Pointe de la Varde. Source wikipédia.
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Vue de côté de la casemate (R506c) pour un canon anti-char de 47 millimètres Pak 36 Skoda. Au fond, un bastion du fort primitif. Photographie FortificationetMémoire (2018).
Un bunker-abri (R112a) pour cloche blindée cuirassée (35P8) permettant des vues lointaines vers le large au moyen d’un périscope de vision ou rapprochée par un système de diascopes.
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Le R112 avec sa cloche pour mitrailleuses surveillant l’accès à la position. Au fond, le Mihinic. Photographie FortificationetMémoire (2018).
Un observatoire d’artillerie (R120) sous cloche (441P01) dirigeant le tir de la batterie Bttr. 405 des Ormeaux.
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Divers abris (R622, R502) construits dans les fossés du fort et un dans la partie nord de la position (R622) assurent le confort des troupes au repos et celui de la section de commandement. Le bunker R502 sert de poste de commandement à la garnison allemande en 1944.
En contrebas du R502, se situe un Tobrouk pour mortier.
La défense antiaérienne rapprochée est confiée à un Tobrouk dans lequel est installée une mitrailleuse probablement jumelée.
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D’autres photographies de la position
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Les combats
Depuis le 6 août après-midi, la 83e division américaine est au contact de la Festung Saint-Malo. Le 9 août dans les quartiers est de Saint-Malo, le 329th US Inf. Regt. se prépare à l’assaut de Saint-Ideuc et de la Pointe de la Varde, deux points d’appui se soutenant mutuellement de leurs feux. Le 12 août, après trois jours de bombardements visant plus particulièrement les organes de défense des arrières et les canons antichars, l’infanterie américaine monte à l’assaut. Sur le site de Saint-Ideuc nettoyé par le bataillon d’assaut, plus de 150 Allemands se rendent.
Quant à la Varde, elle tombe le 13 août au soir. Plus d’une centaine de soldats allemands y sont faits prisonniers. Sa chute livre la moitié est de Saint-Malo aux alliés. Il reste à conquérir : le fort de la Cité, le centre ville et l’île de Cézembre encore solidement tenus.
Aujourd’hui
Demeurée terrain militaire, le fort de la Varde va tomber dans l’oubli, sauf pour les ferrailleurs. Toutefois, la position n’a pas été dépouillée de tout ses équipements. Beaucoup de cuirassements sont encore en place. La cloche observatoire, la cloche des mitrailleuses et la casemate cuirassée pour mitrailleuse sont visibles. La casemate de 105 millimètres à l’angle nord-ouest possède encore ses portes blindées. Plusieurs modèles de portes et de cuirassements sont visibles.
En 1989, le site fait l’objet d’une importante campagne de déminage.
Acquise par le Conservatoire du littoral, la presqu’île est gérée par le Conseil général d’Ille-et-Vilaine.

Vue aérienne de la pointe de la Varde mettant en évidence les éléments de la position fortifiée. Copyright@ Benoît Marembert.
La Garde Guérin (« Paulus » Ra145)
La Garde Guérin est un promontoire rocheux culminant à 48 mètres au nord de la commune de Saint-Briac-sur-Mer en Ille-et-Vilaine. De son sommet, on dispose d’une vue étendue, du Cap Fréhel, à l’ouest, et jusqu’à la pointe du Meinga, au-delà du fort de la Varde, à l’est.

La Garde-Guérin dans les années 1920, il n’y a aucune construction. Peut-être une cabane Vauban ou un corps de garde.
- Ra 146 : pointe de la Garde Guérin sud : R667, R501, R600b, Unterstand, Munitionsbunker x 4.5 cm KwK ;
- Ra 144 : le port Hue : R105c, Ringstand couvert, R501, Vf58c x4, 5 cm Kwk ;
- Ra 143 : plage de Longchamp est : R667, R105c, R501, Vf58c x 2, R616 x 2, Vf/Mg Stand, 5 cm KwK, 7,5 cm F.K. x 2 ;
- Ra 142 : pointe du Décollé : Vf/B.Stellen, Geschützstellung x 2, 7,5 cm F.K. x 2 ;
- Ra 141 : Saint-Lunaire : Packstand, Munitionsbunker, Pak.

Plan général de l’ouvrage d’artillerie de la Garde Guérin avec ses galeries souterraines. Collection Heimdal d’après M. Truttmann.
De conception différente des ouvrages défensifs côtiers, Ra145 Paulus (nom de code de l’ouvrage) est un ouvrage d’artillerie offrant un réseau de galeries sous roc d’une longueur approximative de 400 mètres. Ce réseau consiste en une galerie principale creusée dans l’axe de la pointe et orientée au nord-ouest. Elle mesure environ 120 mètres de long et s’enfonce en moyenne à 10 mètres sous terre. Le long de celle-ci sont disposées des niches ou des magasins pour matériel, artifices…Le plus vaste d’entre eux mesure 5 mètres sur 10 mètres. Des galeries secondaires permettent d’accéder aux différents blocs de combat et aux casemates d’artillerie. Seules deux galeries sont revêtues : celle du poste de direction de tir et celle du bloc mitrailleuses de défense contre avions.
Tous les cuirassements ont disparu tôt après la guerre, ni cloches, ni pièces d’artillerie, ni portes blindées…
Ses blockhaus abritent deux espèces de chauves-souris inscrites au livre rouge des espèces menacées en France : le grand murin et le grand rhinolophe. C’est actuellement un espace naturel départemental et leurs accès obturés par des grilles. Les aménagements réalisés par le Conseil Général dès 1983 (aires de stationnement, sentiers balisés, suppression de points dangereux), permettent aux promeneurs de profiter de ce patrimoine de qualité en toute sécurité. La Garde Guérin est l’un des douze espaces naturels de l’Ille-et-Vilaine bénéficiant d’un sentier d’interprétation, constitué de douze blocs de granit délivrant des informations sur la végétation, la faune, l’histoire, les fortifications… Et le seul espace (2018) à avoir son application personnelle sur Androïd.
L’île de Cézembre (« Ostwall » Ra277)
Cézembre est un îlot granitique, situé en baie de Saint-Malo d’une superficie de 17 hectares (650 mètres sur 250 mètres) et culminant à 38 mètres. Il s’agit de la plus importante des îles de la baie de Saint-Malo. Le côté sud possède une plage de sable fin et une longue jetée d’accostage en pente, juste en face de la cité corsaire. Tandis que les autres côtés sont couverts de rochers et inaccessibles via la mer. Cézembre est naturellement protégée par les courants marins de dix nœuds et des marées de fortes amplitudes.
« Cézembre, gracieux îlot qui s’incline en pente douce vers le midi. Une sorte de vallon central partage ses deux monts autrefois verdoyants. » […] (François René de Chateaubriand).
Cézembre ferme l’estuaire de la Rance et commande les deux chenaux d’accès au port de Saint-Malo.
Ayant au cours de son histoire, l’îlot a abrité des ermites puis à partir du XVe siècle un monastère, il eut ensuite à partir de la fin du XVIIIe siècle une vocation militaire pour la défense de la cité malouine. Un armement défensif est installé contre les Anglais et les huguenots. Cet armement se compose de six couleuvrines et de deux canons sans maçonnerie. Vers 1694 des emplacements de batteries sont construits en dur : six bouches à feu sont positionnées de manière définitive au sommet nord-est.

Plan de l’île de Cézembre (fin 17e siècle – première moitié 18e siècle). Source patrimoine région-bretagne.
Puis, au fil des époques l’îlot sert d’entrepôt, de repaire de contrebandiers ou de lieu de quarantaine.
En 1756 deux canons et quatre pièces sont mis en place ; ils tirent lors de la tentative anglaise de débarquement de 1758 aboutissant à la bataille de Saint-Cast et à la déroute britannique. Après la guerre de 1870, la protection de Saint-Malo, seul port entre Cherbourg et Brest, justifie l’installation d’un ensemble doté d’une puissance de feu redoutable : quatre pièces de 240 millimètres couvertes, en défense rapprochée, par trois mortiers de 270 millimètres. Des soutes à munitions sont creusées dans le rocher, une galerie les relie. Du côté du chenal de la Conchée : deux batteries de chacune quatre tubes, 95 millimètres et 90 millimètres. Un réseau ferré Decauville (écartement de 50 centimètres) traverse l’îlot du nord au sud.

Batterie de la Tente, mortiers de de 270 modèle 1889 sur affût G à châssis circulaire modèle 1890 pour la défense des côtes maritimes. Source Wikipédia.
Rendu obsolète par les progrès de l’artillerie, l’îlot en 1910 sert à garder des éléments des bataillons d’infanterie légère d’Afrique (les Bat’ d’Af’) surveillés par une demi-compagnie du 47e régiment d’infanterie, alors caserné à Saint-Malo et à Saint-Servan.
En 1914-1918, Cézembre est donnée à la Belgique comme territoire de souveraineté [comme Saint-Adresse en Seine-Maritime et Beaulieu-sur-Mer dans les Alpes-Maritimes].

Chapelle Saint-Brendan (aujourd’hui disparue) construite par les Belges durant leur séjour sur l’îlot.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, l’îlot est largement fortifié par les Allemands et résiste en août 1944 aux troupes américaines lors de la libération de Saint-Malo. Il subit pendant plus de trois semaines un bombardement intensif, tant aérien, maritime que terrestre, dont l’île garde encore les stigmates aujourd’hui.
Les Allemands occupent l’îlot
Quand les Allemands fortifient Saint-Malo, ceux-ci décident d’octroyer à Cézembre un rôle essentiel.
Sur Cézembre, les constructions sont réalisées selon les principes de l’armée de terre (Heer) et non ceux de la marine (Kriegsmarine) qui prévalent sur la majorité du mur de l’Atlantique. Les travaux démarrent à l’automne 1942 pour se terminer quatorze mois plus tard.
Les abris en béton sont réservés aux casernements, aux munitions, aux réserves de vivre et d’eau, de même qu’aux observatoires et au poste de tir. Pas de casemates actives, juste quelques blockhaus pour la défense rapprochée. Pas non plus de casemates bétonnées pour l’artillerie. Avant d’être classé zone de combat, l’îlot abrite un village de baraques avec son Soldatenheim (foyer du soldat), les mess des officiers et des sous-officiers, et même une étable pour avoir du lait frais. L’eau est transportée par bateau-citerne, la source présente sur l’îlot n’est pas suffisante pour satisfaire aux besoins.

Une vue de la partie « vie » de l’îlot sous la présence allemande. Au premier plan ce qui semble être un réservoir d’eau et derrière les baraquements. Au fond, une longue rampe de déchargement semblant de la plage jusque sur les hauteurs de l’îlot. Source archives militaires allemandes.
L’artillerie principale se compose de six pièces françaises de 194 millimètres (modèle 1870 modifié 1893). Ces pièces de marine ont été retirées des croiseurs en 1914 pour être installées sur voie ferrée. Devenue l’A.L.G.P. (Artillerie Lourde Grande Puissance), elles ont reçu un blindage pare-éclats et peuvent tirer tous azimuts. Tube en fonte marine, tubé et fretté acier. Munitions de 85 kilogrammes, portée 18 300 mètres. 18 servants, 3 brigadiers et un chef de pièce composent l’équipage. Cadence de tir 1 coup/2minutes. Sur Cézembre, ces pièces sont positionnées en cuve pour le tir dans toutes les directions.

Un canon de 194 millimètres TAZ modèle 1870/1893 monté sur affût à pivot central. Source http://basart.artillerie.asso.fr
La position :
On note quatre-vingt cinq constructions dont trois antérieures à la seconde guerre mondiale.

Photographie aérienne des positions est de Cézembre, celles-ci sont parfaitement identifiables de même que les cratères d’obus et de bombes.
Élément majeur de la fortification, le poste de commandement de tir est du type Marine M.157 à 3 niveaux, et il est accolé à un abri passif R.635 par l’adjonction d’une plaque bétonnée formant un porche entre les deux constructions. L’étage inférieur est le cœur de la batterie Ostwall, nom de code de Cézembre.
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L’îlot comporte six soutes à munitions de type S302. L’une est située à l’extrême pointe près d’une vaste aire circulaire bétonnée dont le parapet est ouvert sur l’arrière pour donner accès à la cuve qui était reliée par une voie étroite de 0.60 mètres..

Une soute à munitions avec un encuvement pour une pièce anti-aérienne sur son toit. Source bunkerSite.com
Reliée à la cuve E1 par la voie de 0.60 m, la soute à munitions S1 est formée d’une double entrée traversant par un large couloir toute sa longueur. L’agencement des locaux est identique à toutes les soutes S de l’île, à savoir deux salles rectangulaires qui débouchent sur des travées parallèles au couloir d’arrivée. Une fenêtre de manutention est percée dans la paroi séparant la travée du local de stockage. La soute S1 est surmontée d’une cuve de flak pour pièce de 20 mm. La La Garde-Guérin dans les années 1920, il n’y a aucune construction. Peut-être une cabane Vauban ou un corps de garde. à munitions S2 est identique à S1 mais sans cuve de flak en toiture.
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Au nord de l’île un abri M158 et une soute à munitions et un encuvement pour un canon de 15 cm SK L/45 (canon de 15 cm SchnelladeKanone (canon à rechargement rapide) de calibre 45) qui est un canon naval allemand de calibre 15 centimètres utilisé pendant la Première et la Seconde Guerre mondiale. Afin de faciliter le tir des grosses pièces de nuit, les Allemands utilisent ce canon pour le tir d’obus éclairants. Ce canon peut en outre apporter son concours pour des tirs réguliers en cas de nécessité.
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Six pièces de 194 millimètres TAZ Modèle 70/93 en cuve d’artillerie (Geschutzstellung). L’implantation des pièces en position à ciel ouvert est liée à la réalisation d’une assise suffisamment solide pour supporter le poids du matériel. Au centre de cette assise est coulé dans le béton un axe d’acier supportant une embase circulaire crantée surmontée d’une colonne cylindrique. Cette plaque qui fait office de chemin de roulement supporte quatre galets montés sur des axes solidaires de jambes de force en acier qui s’adaptent dans les crans de l’embase circulaire, facilitant la rotation de l’ensemble galets-jambes autour de la colonne cylindrique. Ces éléments forment le bâti, communément appelé affût.

Une des pièces de 194 millimètres. Cette vue permet de distinguer les galets, le bâti et la plaque crantée.
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Cinq abris pour vingt hommes de type R622.
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Deux abris R635 conçu pour recevoir deux groupes de combat ( 2 x 10 hommes ), il pouvait servir à abriter les servants de pièces d’artilleries ou servir de PC de position.

Carte postale montrant une vue aérienne de l’ile de Cézembre, le rocher aux mouettes et le phare du jardin. On distingue parfaitement le poste de tir et les encuvements des pièces d’artillerie.
Six pièces antiaériennes françaises de 75 mm Mle 36 rebaptisées 7,5 cm Flak 36 (f) en encuvement (Flakstellung). Misent en batterie par neuf hommes. Cadence de tir 25 coups/minute. Ces canons sont montés sur plateforme cruciforme.
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Pièce de 75 Flak. A remarquer le tube déformé par la chaleur dégagée lors des bombardements au napalm et au phosphore.
En complément de cette défense principale anti-aérienne, il existe également un certain nombre de canons complémentaires, trois tubes de 40 mm Bofors et plusieurs pièces de 20 mm Flak, notamment le 2 centimètres Flak 38 de la firme Mauser.
Il existe également deux souterrains français réutilisés par l’occupant. Le premier à côté de l’encuvement nord-ouest, s’ouvre dans sa paroi en une galerie en pente descendante à escalier. Cet ouvrage est taillé à même le roc et débouche sur un large tunnel transversal. Il servait de soute à munitions avec monorail aérien et puits de décharge vertical avec boyau de décompression débouchant dans la falaise. Le souterrain est creusé dans un terrain granitique se présentant sous la forme de roches faillées et clivées dans certaines zones. On ne découvre pas de fissures visuelles mais le sol est parsemé de gros quartiers de roc. Le second, identique dans sa conception globale, est situé à proximité du poste de tir. Son entrée est bouchée. Le tunnel transversal mesure environ 30 mètres et le puits de décharge vertical se trouve à l’aplomb de la soute à munitions. Lors des bombardements, les Allemands se réfugièrent dans ces tunnels. Il servit d’hôpital pour la garnison.
Des postes d’observation ( Vf Beobachtung),de petits bunkers formés d’une simple salle d’observation recouverte d’une dalle bétonnée.

Un poste d’observation sur la partie est de l’îlot, au fond on aperçoit le poste de tir. Source bunkerSite.com
Les combats
La garnison compte alors 323 hommes : Allemands, Italiens, Russes et Polonais. Les Allemands appartiennent à la Marine-Artillerie-abteilung 608. La garnison est commandée par le Kapitänleutnant Richard Seuss et secondé par l’Oberleutnant zur See Eckert. La plupart sont des artilleurs Allemands de la Marine-Artillerie-Abteilung 608 (M.A.A. 608 / groupe d’artillerie côtière de marine 608 dont le commandement se situe sur l’île de Jerzey).
À partir de 1944, deux officiers et une cinquantaine de soldats italiens (selon les sources, entre 12 et 70 soldats italiens) ayant survécu aux combats de Normandie débarquent sur l’îlot. Vêtus de leur uniforme gris de la République Sociale Italienne, ils s’installent sur la pointe sud-ouest de l’île, ce sont pour la plupart des artilleurs de la défense anti-aérienne. Dans son rapport de reddition de Cézembre, rédigé le 3 septembre 1944 le capitaine de l’US Navy Reserve James E.Arnold mentionne 67 italiens. Certaines sources parlent aussi de soldats russes et géorgiens, une partie des quelques 10 000 Soviétiques recrutés par les Allemands dans les camps de prisonniers.
Cézembre contrôle Saint-Malo, son port et le fort de Saint-Servan (voir la troisième partie de cet article). Aucun débarquement n’est envisageable sur les plages de Saint-Malo tant que ses 37 bouches à feu ne sont pas mises hors de combat.
Dés la chute de Saint Malo, le soutien logistique de Cézembre ne peut plus se faire que par les îles anglo-normandes.
Les premiers bombardements de l’île commencent le 6 août et se répètent le 11. Le 13, soixante-neuf B-24 Liberator larguent 275 tonnes de bombes sur Cézembre. Le 17, Saint Malo tombe. Dés lors, le seul recours, pour les défenseurs de l’île, est Guernesey. En effet, depuis son bunker de Saint Peter Port, l’amiral commandant les îles peut joindre directement, par radio : Berlin, Rastenburg et… Cézembre. Ceci permet à la garnison assiégée de réclamer eau, vivres, munitions, pièces de rechange pour l’artillerie et un médecin.
L’île ne peut être ravitaillée que de nuit, bien entendu. Le premier voyage s’effectue dans la nuit du 19 août au 20 août ; deux bâtiments de la 2e flottille de patrouilleurs mettent 4 heures pour gagner Cézembre.
Après le déchargement de leur cargaison et la réparation du poste émetteur de la garnison, les marins évacuent les blessés, un seul bateau parvient à repartir pour Jersey, l’autre s’étant échoué. Le lendemain, il est remis à flot, pour être aussitôt coulé par un tir d’artillerie américain.
Le 21, des plénipotentiaires américains viennent en vedette pour demander à l’Oberleutnant Seuss la capitulation de sa petite île. Celui-ci refuse catégoriquement en disant qu’il n’est pas dans les habitudes d’un officier allemand de se rendre.
Dans la nuit, l’aviation alliée effectue un raid vers 22 heures. Puis, au petit jour, des tracts sont largués, invitant les Allemands à cesser un combat inutilement sanglant. Une nouvelle tentative de reddition, montée par le général Macon, échoue. Le major Alexander, envoyé sur l’île, rentre sans avoir obtenu satisfaction. C’est un tir d’artillerie envoyé par Cézembre qui salue son retour au port. Pour Alexander, cependant, la fin semble proche : l’îlot n’est que ruine et désolation. Et pourtant, Seuss refuse toute reddition, alors même que l’île est totalement ravagée : tout est détruit en surface ; l’un des dépôts de munitions sous abri a sauté… A chaque bombardement, des corvées poussent du haut des falaises les bombes non explosées.
Néanmoins, la volonté reste intacte et, depuis les tunnels ou ils sont terrés, les hommes réparent et remettent en action les canons demeurés entiers.

Photo aérienne de Cézembre, avec Saint-Malo en arrière plan, prise par un avion de l’USAAF depuis le nord-ouest de l’île après un bombardement. On remarque la surface criblée de cratères de bombes. Sur le côté nord-ouest (à droite), on distingue 2 cercles, correspondant à 2 des 3 cuves abritant les canons de 194 et présentes de ce côté de l’île (les 3 autres cuves se trouvent sur le côté opposé). Entre les deux, se dresse le bunker à étages servant de poste de tir. Source archives militaires américaines.
À Saint Peter Port, au bunker Seeko ( Seekommandant der Kanalinseln) une opération est mise sur pied pour soulager la garnison de Cézembre, qui vient de demander des obus de 150 millimètres et de 194 millimètres. Les munitions de 150 millimètres ne sont pas trop difficiles à trouver : elles sont prélevées sur le stock de la batterie (Lothringen) à Saint-Brelade (Jersey). Les obus 194 millimètres sont, quant à eux, introuvables : la dernière batterie de ce calibre vient de tomber en France…
Un bateau cingle aussitôt vers Cézembre pour apporter les 150 millimètres. Il rentre sur Jersey avec des blessés. Outre l’intérêt militaire évident des navettes entre Cézembre et Jersey, celles-ci ont une influence bénéfique sur le moral des hommes de Seuss. Elles permettent d’évacuer les blessés et montrent que la petite garnison n’est pas oubliée.
Le 26 août, un nouveau bombardement ravage l’îlot à 15 heures. Trois pièces de 194 millimètres sont alors mises hors de combat et l’Oberleutnant Eckert, adjoint de Seuss, est gravement atteint. La plupart des bunkers encore intacts servent de postes de secours aux nombreux blessés, Dans l’infirmerie de l’île installée dans une ancienne galerie souterraine de armée française, on ampute les blessés à la lame de rasoir.

Une des pièces antiaériennes françaises de 75 mm Mle 36 rebaptisée 7,5 cm Flak 36 (f) en encuvement détruite par les bombardements (ou l’artillerie) américaine. Source archives nationales américaines.
Tandis qu’une autre demande de reddition échoue, de nouveaux raids aériens ravagent l’île. Soixante-quinze A-20 et B-26 attaquent le 30 août. Le lendemain, vingt-quatre P-38 largue du napalm sur Cézembre. Parallèlement, les Américains mettent en place sur le continent plusieurs pièces de 203 millimètres, dont l’objectif est la destruction des trois cuves en béton armé qui constituent les réserves d’eau de l’île.
Mais ces bombardements, comme ceux venus de l’air, manquent d’efficacité. Et la décision sera emportée par le cuirassé de la Royal Navy, le Warspite pilonnant l’îlot rocheux pendant deux heures et demie. Les obus de rupture de gros calibre causent des destructions considérables, perçant les blindages et les dalles de béton. Aussitôt le bombardement naval fini, l’aviation alliée prend le relais, larguant napalm et phosphore sur Cézembre.

Document de l’armée américaine sur le bombardement au napalm. Source archives militaires américaines.
Sur les 323 hommes de la garnison, 297 sont à présent blessés. Deux vétérans du front de l’est reconnaîtront d’ailleurs que Stalingrad n’était rien à côté de Cézembre…Il est couramment admis que Cézembre à la plus forte concentration d’explosifs (20 000 bombes) au regard de sa maigre superficie (plus que Stalingrad), ceci pour la seconde Guerre mondiale. De plus, un déluge de feu a été versé sur la terre déjà meurtrie par les bombes, à travers d’énormes quantités de napalm, récemment utilisé en Europe, mais jamais d’une façon si intensive.

Civils et militaires assistant depuis Dinard au bombardement de Cézembre. Sources archives militaires américaines.
Le Seekommandant envoie aussitôt un navire hôpital, le Bordeaux et une barge, afin de secourir les défenseurs ou de les évacuer. Mais les alliés les arraisonnent.
Lorsque le 17 août, le colonel von Aulock, avant de hisser le drapeau blanc sur le fort de la Cité, envoie un ultime message à Seuss en lui souhaitant bonne chance. À partir de cet instant, Seuss passe sous le commandement de l’amiral Hüffmeyer, responsable des îles anglo-normandes.
Le 1er septembre 1944, 14 jours après la chute de Saint-Malo, une vague de 33 bombardiers largue du napalm, tandis que le Warspite reprend ses tirs de 380 millimètres de rupture. Du sol breton, des batteries américaines nouvellement installées de 155 millimètres, 203 millimètres et 240 millimètres pilonnent l’îlot, écrasant sous les obus les entrées des bunkers, les façades arrières, les tunnel et les embrasures.
Cette fois, c’est la fin. Seuss demande à Guernesey l’autorisation de cesser le combat.
– « Tenez bon, Grohne arrive » lui est-il répondu.
Cézembre transmet en retour :
– « Mes hommes préféraient se battre l’arme au poing que mourir à petit feu dans les bunkers ».
La flotille partie de Jersey doit faire demi-tour à cause du gros temps et le Seekommandant autorise alors Seusse à se rendre après destruction de ses livres de code et de ses documents. La garnison jette alors ses armes à la mer, détruit tous ses papiers et fait sauter les quelques rares canons encore intacts. Et l’Amiral Hüffmeyer souhaite bonne chance à Seuss avant que celui-ci ne détruise sa radio.
Le 2 septembre, à 7h30, un drapeau blanc s’élève sur l’île, à la stupéfaction des Américains qui n’y croyaient plus et qui s’apprêtaient à embarquer sur des barges de débarquement, pour une opération amphibie prévue le jour même.
A midi, la reddition de lîle est effective. Seuss se rend avec 2 officiers italien et environ 297 hommes au Major Général Robert C.Macon. Il restait dans l’île 15 jours de vivre, mais plus d’eau, plus de munitions et la situation des blessés était devenue catastrophique.

Les rescapés de Cézembre regroupés sur la plage avant leur embarquement vers la captivité. Source archives militaires américaines.

La garnison de Cézembre, après sa reddition, embarque sur des barges américaines. Sources archives militaires américaines.
La chute de Cézembre marque la fin de la bataille de Saint-Malo.

L’arrivée sur l’île de Cézembre dans les années 50, avec le célèbre « Repaire des corsaires », toujours en activité.

1968, Cézembre et le restaurant « le repaire des corsaires ». A remarquer le môle bétonné construit par les Allemands.
Aujourd’hui
Article des Echos d’août 2016.
Le 5 novembre 1945, Cézembre est inscrite à l’inventaire des sites et est depuis un site classé.
Terrain militaire géré par la Marine nationale, l’île fait l’objet de deux grandes campagnes de déminage juste après guerre, suivies d’autres plus ponctuelles, principalement sur l’estran lors des marées d’équinoxe. La plage sera de nouveau accessible au public dans les années 1950, mais la majeure partie de l’île reste interdite d’accès pour des raisons de sécurité.
À compter de 1962 et pendant plus d’une dizaine d’années, Cézembre abrite des mouflons corses.
De mars à mai 2008, l’île et les eaux environnantes ont été de nouveau entièrement interdites d’accès au public pour permettre à la Marine nationale de mener de nouveau une vaste opération de déminage. La plage principale a ainsi été déminée sur plus de trois mètres de profondeur, ce qui n’avait jamais encore été fait. Lors du déminage de seulement le tiers de la plage, plus de 80 obus ont déjà été récupérés. Malgré cela, des bombes ou obus réapparaissent encore quelquefois. Ainsi en mai 2016, un promeneur et son fils trouvent sur la plage, à marée basse, un obus de 250 kilogrammes.
Une fois complément dépolluée, l’île doit être acquise par le Conservatoire du littoral mais cette acquisition est plusieurs fois reportée du fait des retards et de la complexité de cette dépollution.
Finalement le transfert au Conservatoire du littoral devrait intervenir fin 2017. Il a été décidé de ne pas dépolluer intégralement l’île, trop compliqué et couteux et qui aurait impliqué de détruire la végétation et donc les espaces de nidification des oiseaux, mais de juste dépolluer un sentier balisé de 800 mètres qui sera clôturé de part et d’autre. Parcourant une partie de l’île, ce sentier permettra aux visiteurs de découvrir les vestiges de la Seconde Guerre mondiale et la faune et la flore de Cézembre. Cette dépollution du sentier et de ses abords immédiats a été faite par le groupe de déminage brestois de la Marine nationale en février 2016 et mars 2016 et l’ouverture du sentier initialement prévu à l’été 2017 a été reporté à mi-octobre de cette même année. En 2018, le département d’Ille-et-Vilaine assure pour le compte du Conservatoire du littoral la gestion et la surveillance du site.
Un article paru dans Ouest-France de mars 2017 (PDF,plus lisible) :
Un fort joli ouvrage paraît à point nommé, peu avant l’ouverture du sentier balisé de 800 mètres à Cézembre (vers la mi-avril 2018). Une artiste et un historien y dépeignent l’île avec les touches justes, les anecdotes, et l’émotion. « Le réveil de Cézembre », est en vente (23 €) dans les principales librairies de la Côte d’Émeraude.
Une bande dessinée sur Cézembre :
Synopsis : Saint-Malo, août 1944. Alors que gronde la rumeur du débarquement américain, dont les troupes avancent inexorablement, combattant une armée allemande de plus en plus proche de la débâcle, le jeune Erwan, 18 ans, ronge son frein. Témoin de la mort de son père et de son oncle, victimes de soldats allemands, il rêve de rejoindre la résistance alors que couve le combat pour la libération de la cité. Seule la volonté de son grand-père, farouchement opposé à le voir risquer sa vie, le retient de franchir le pas. Mais lorsque l’un de ses meilleurs amis se fait tuer après être tombé dans une embuscade allemande, et qu’il apparaît que le responsable direct n’est autre qu’un de leurs amis d’enfance, il décide de se jeter dans la mêlée, à la veille de la bataille qui décidera du sort de Saint-Malo, et de sa libération. Un récit de guerre qui s’intéresse à un épisode intense et décisif de la libération, à travers la destinée de quatre adolescents pris dans le chaos de la guerre.